L’expérience de la Grande Guerre

7 octobre 2013
La grande guerre dans la vie et l'oeuvre de Georges Braque

Attaque du 1er régiment de tirailleurs marocains, le 28 juin 1918, à 5 h Charles Paul RENOUARD © Photo RMN-Grand Palais - F. Vizzavona



« Georges Braque a entrepris et mené à bien, dans sa vie et son expérience de peintre, une aventure méthodique », écrivit à son sujet le poète Pierre Reverdy, grand admirateur du cubisme.



Cette ligne de continuité, cette œuvre construite pas à pas, avec rigueur et exigence, au fil d’une vie discrète et paisible, connaît cependant une rupture. La guerre de 14-18 marque l’homme dans sa chair, l’artiste dans son œuvre.



Le 2 août 1914, Picasso, installé avec Juan Gris et Max Jacob à Céret, accompagne Braque (qui loue un atelier à Sorgues) et Derain à la gare d’Avignon. L’Autriche-Hongrie a déclaré la guerre à la Serbie. Affecté au 329e régiment d’infanterie avec le grade de sergent, Braque suit une formation d’élève mitrailleur à Lyon. Le 14 novembre, il est envoyé au front, dans la Somme, et à Marincourt le 17 décembre. Sa bravoure au combat se voit récompensée par deux citations et une promotion au grade de sous-lieutenant.



Le 15 janvier 1915, il est affecté au 224e régiment d’infanterie. En mai, son régiment est engagé dans la première bataille d’Artois. Le 11 mai, à Neuville-Saint-Vaast, atteint par un éclat d’obus à la tête, il est laissé pour mort. Trépané, il passe quarante-huit heures dans le coma. Lorsqu’il reprend conscience, il reste temporairement aveugle. Sa femme Marcelle se rend à son chevet, en compagnie de Picasso. Braque est décoré de la Croix de guerre.



La « cordée en montagne » s’achève pour les géants du cubisme. Kahnweiler rappelle dans ses mémoires : « Picasso m’a souvent dit  " Le cubisme a été un travail d’équipe ". La guerre avait dispersé l’équipe. » Dès lors, leurs chemins divergent. Loin du front, Picasso a avancé, défriché d’autres horizons (en Italie, à Montrouge, en participant à Parade avec la troupe de Diaghilev, en rencontrant Stravinsky). Sa notoriété n’a cessé de croître. Convalescent, Braque traverse des mois sans peindre. Son marchand, Kahnweiler (de nationalité allemande), dont les biens ont été mis sous séquestre, s’est exilé en Suisse. Le peintre signe un  nouveau contrat avec la galerie de l’Effort moderne de Léonce Rosenberg.



En 1917, de retour à Paris, démobilisé, Braque se remet au travail. Au lendemain de la guerre, il se consacre essentiellement à la nature morte, aboutissement du cubisme synthétique. A son retour à la vie civile, il commence à rédiger ses Cahiers, des sentences illustrées, publiées pour la première fois dans la revue Nord-Sud de Reverdy sous le titre Pensées et réflexions sur la peinture : « Faire des progrès en art, ce n’est pas étendre ses limites mais mieux les connaître. » Par la suite, tout en ayant intégré ses évolutions plastiques, Braque délaissera les hardiesses de l’avant-garde cubiste. Une page est tournée.



En vidéo, le collectionneur et marchand d'art Daniel-Henry Kahnweiller évoque l'influence de la guerre sur les peintres...






 

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