Niki de Saint Phalle et le Nouveau Réalisme

22 septembre 2014
Une franc-tireuse parmi les hommes.

Niki de Saint Phalle en train de viser, photographie en noir et blanc rehaussée de couleur extraite du film Daddy, 1972. (détail) © Peter Whitehead

27 octobre 1960 : dans une ambiance électrique, chez Yves Klein, huit artistes (1) et un critique, Pierre Restany, prennent « conscience de leur singularité collective » et signent l’acte de naissance du plus important mouvement français de la décennie.



Niki de Saint Phalle ne fait pas partie des fondateurs du Nouveau Réalisme, mais est déjà proche de deux de ses membres : le sculpteur Jean Tinguely, dont elle est la compagne, et Daniel Spoerri. C’est ce dernier qui encourage Jacques Villeglé à intégrer une œuvre de Saint Phalle au salon « Comparaisons, Peinture – Sculpture » qu’il organise au Musée d’art moderne de la Ville de Paris début 1961. Mais c’est à l’occasion du premier « Tir » de l’artiste, le 12 février 1961, que Pierre Restany, témoin et participant enthousiaste de l’événement, l’invite à rejoindre le groupe. L’aspect spectaculaire de son travail et la grande beauté de Niki de Saint Phalle font d’elle l’un des membres les plus médiatiques du Nouveau Réalisme.



Dès avril 1961 (2), ses Tirs sont montrés au journal télévisé et, cette même année, plus d’une cinquantaine d’articles sont publiés sur l’artiste. Comme Klein, Niki de Saint Phalle prend très tôt conscience de l’importance de la communication et de la nécessité de garder trace de ses performances. Ses Tirs, dès le premier, sont alors des événements publics, participatifs et documentés auxquels de nombreux Nouveaux Réalistes prennent part avec enthousiasme.

 

La « singularité collective » et les « nouvelles approches perceptives du réel » décrites par la déclaration constitutive du Nouveau Réalisme laissent la place à une grande variété de pratiques au sein du mouvement. Pour autant, Niki de Saint Phalle peut se reconnaître dans l’approche renouvelée de la ville et le goût des matériaux contemporains propres à de nombreuses personnalités du groupe, de même que le rapprochement de certains artistes avec l’art naissant de la performance. La violence exercée lorsqu’elle tire sur ses toiles pour en libérer la couleur et ainsi « faire saigner la peinture », par exemple, peut faire écho à celle déclenchée par les « Colères » dans lesquelles Arman brise instruments de musique ou mobilier et dont les reliques sont ensuite assemblées en un tableau. Dans les deux cas, l’acte de destruction devient geste créatif.

 

Seule femme artiste au sein d’un groupe d’hommes, Niki de Saint Phalle a toujours évoqué sa participation à l’aventure du Nouveau Réalisme avec fierté et entretient des relations stimulantes avec certains de ses membres bien après l’arrêt officiel du mouvement en 1963.

 

1. Outre Klein : Jacques Villeglé, Raymond Hains, François Dufrêne, Arman, César, Jean Tinguely et Daniel Spoerri.

2.Sur la médiatisation télévisuelle du travail de Niki de Saint Phalle, on peut consulter le texte de Catherine Gonnard, « Niki de Saint Phalle, figure de proue de l’avant-garde à la télévision », dans le catalogue de l’exposition : Niki de Saint Phalle, Paris, RMN, 2014.

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