Œuvres commentées d'Élisabeth : Jeanne Julie Louise Le Brun se regardant dans un miroir

20 octobre 2015
Pour vous faire découvrir un peu plus l'exposition Élisabeth Louise Vigée Le Brun jusqu'au 11 janvier 2016 plongez dans les tableaux de la célèbre portraitiste...


Élisabeth Louise Vigée Le Brun, Jeanne Julie Louise Le Brun se regardant dans un miroir, 1787, Collection particulière

Jeanne Julie Louise Le Brun

se regardant dans un miroir



Le Salon de 1787 fut pour Mme Vigée Le Brun non seulement celui auquel elle exposa le célèbre portrait de Marie-Antoinette et ses enfants, mais aussi celui qui lui permit d’obtenir ses lauriers comme peintre de l’enfance.

Cette année-là, elle présentait en effet trois effigies de mères accompagnées de leurs enfants, la reine, les marquises de Pezay et de Rougé, et elle-même, un portrait de garçonnet, « le petit d’Espagnac » (Londres, Wallace Collection), et deux fillettes, Caroline Lalive de La Briche et Julie Le Brun.

Née le 12 février 1780, Jeanne Julie Louise Le Brun s’imposait en 1787 en modèle fétiche. Sur l’autoportrait du Louvre, elle trouvait refuge dans les bras de sa mère. Sur un deuxième portrait, elle somnolait sur une bible (New York, coll. part.). Sur un troisième, elle offrait aux visiteurs le reflet de son joli visage dans un miroir. La composition au miroir semblait avoir particulièrement plu à l’artiste qui en avait peint deux exemplaires, l’un sur bois, qui fut très certainement le premier en raison des repentirs qui affectent la composition, l’autre exécuté sur toile (coll. part.). Ainsi que Joseph Baillio l’a souligné dès 1982, l’image révélant, suivant une perspective impossible, et le profil, et le visage de face, pouvait avoir été influencée par des œuvres antérieures dont l’artiste avait probablement eu connaissance parce qu’elle les avait vues parmi les tableaux à vendre chez son époux, ou dans l’une des nombreuses collections qu’elle visitait régulièrement. Le lien le plus direct est indéniablement avec une toile attribuée à Jusepe de Ribera où un philosophe de trois quarts révèle les traits de son visage dans un miroir.



Peut-être l’artiste connaissait-elle aussi la belle composition de Nicolas Régnier (1591-1667) datée de 1626 figurant une jeune femme à sa toilette (Lyon, musée des Beaux-Arts). Développés dans la peinture en Italie, à Venise et à Naples, les jeux de miroir avaient également permis à François Boucher de peindre en 1756 le visage de Mme de Pompadour et le reflet de sa nuque sur le célèbre portrait montré au Salon de 1757 (Munich, Bayerische Staatsgemäldesammlungen, prêt de la Hypo-Vereinsbank).



Exposé au Salon de 1787, l’un des deux exemplaires du portrait de Julie Le Brun au miroir n’avait pas laissé indifférent la critique, même si celle-ci avait avant tout remarqué l’autoportrait de l’artiste avec sa fille, dont on avait loué la tendresse maternelle et l’amour qui « respirait » dans ses yeux. Parmi les Inscriptions pour mettre au bas de différents tableaux exposés au musée du Louvre en 1787 (Paris, BNF, fonds Deloynes, vol. 15, microfiche 8/13-10-11, 602-603), on pouvait ainsi lire : « Dans un même portrait offrir deux fois aux yeux le même objet tenant un meuble de toilette, sans qu’on puisse objecter que l’auteur se répète, ce trait est fort ingénieux. »



Xavier Salmon

 

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