Les pionniers de l’art optique et cinétique

8 avril 2013

Marcel Duchamp, Rotative, plaques-verre 1920 Plexiglas peint, métal, bois, moteur électrique, Paris, Centre Pompidou, musée national d’Art moderne, Centre de création industrielle (C) Succession Marcel Duchamp / ADAGP



 



Lumière. Mouvement. Tout l’art est là, depuis l’Antiquité. Qu’est-ce que la peinture, sinon une étude sans cesse renouvelée sur les variations de la lumière ? Dans les années 60, Soto, connu pour ses expérimentations sur la vibration, ses « Pénétrables » impliquant les visiteurs, ne dit rien d’autre lorsqu’il se revendique en héritier légitime des impressionnistes. Ses œuvres, à l’instar de celles d’autres artistes, invitent l’œil à ne plus être seulement spectateur. La proposition vise à vivre une expérience sensitive, une modification de la perception. Avec le lumino-cinétisme, l’interaction aura tendance à primer sur la contemplation. Ajoutée aux interventions dans l’espace public, la création d’environnements, cette dimension participative sera pour beaucoup dans l’accueil enthousiaste du public. L’op art, l’art cinétique deviendront, très vite, extrêmement populaires.

 

La sculpture cherche elle aussi depuis toujours à saisir le mouvement. Dans le marbre de la statuaire grecque, romaine, du classicisme italien… Changement de perspective avec Calder : de ses premières réalisations jusqu’aux mobiles, le mouvement n’est plus représenté mais utilisé. D’abord, par le biais d’une animation mécanique, puis laissé libre, soumis aux aléas du souffle, de l’air. Dans son sillage, dès le début des années 50, un jeune artiste suisse, Tinguely, utilise à son tour le moteur dans ses œuvres. Pour lui : « L'unique chose stable, c'est le mouvement partout et toujours ». Avec le mouvement, l’œuvre devient transformable.

 

En 1955, l’exposition « Le Mouvement » à la galerie Denise René, à Paris, réunit Soto, Calder, Agam, Bury, Tinguely et Vasarely. A l’initiative de ce dernier, la manifestation lancera un courant au succès retentissant. En rupture radicale avec l’idée de geste en peinture et l'abstraction lyrique qui domine la scène artistique de l’après-guerre, l’exposition consacre l'art cinétique. De nombreuses autres suivront. Parmi celles-ci, « The Responsive Eye » au Museum of  Modern Art de New York, en 1965, jouera un rôle crucial dans la reconnaissance de ces recherches visuelles. Jusqu’en 1972, où ce mouvement entamera une période de longue désaffection. Avant de retrouver un fort regain d’intérêt depuis une quinzaine d’années.

 

L’art optique et cinétique s’inscrit dans le prolongement d’expériences antérieures. A travers de nouvelles propositions, il se pose en traduction moderne de préoccupations plastiques anciennes : comment transcrire les effets de la lumière, du mouvement ? En ce sens, ses tenants historiques se sont revendiqués des expérimentations de leurs prédécesseurs. A ceci près qu’ils disposent des moyens techniques (l’électricité) et des nouveaux matériaux de l’époque (l’aluminium, le plastique), associés à l’idée de progrès. Leur travail s’inscrit dans l’héritage du futurisme, une démarche de renouvellement de l’abstraction, initiée par ces précurseurs de l’expérimentation sur la perception que furent Delaunay, Duchamp, Gabo, Kupka, Moholy-Nagy, Rodchenko, Mondrian, Malevitch, Vantongerloo, Fontana, Albers, Rothko, Klein, Manzoni et bien d’autres. Déjà, il s’agissait pour ces artistes de perturber les repères du spectateur, l’orientation spatiale et temporelle, inventer des dispositifs de remise en cause de la perception en jouant sur l’immersion dans une atmosphère, des phénomènes optiques. Les innovations formelles de ces avant-gardes remontant au début du XXe siècle, prémices d'une certaine conception de la modernité, ont ouvert la voie, continuant d'inspirer la création la plus contemporaine. Utiliser l’espace, la lumière. Agir sur la vision et non plus simplement chercher à représenter. Une révolution du regard.

 

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