Vous avez dit moderne ?

Vous avez dit moderne ?

7 May 2015
Comment Velázquez, peintre du XVIIe siècle peut-il être « moderne » ? Que nous montre-t-il que nous ne voyons pas ? Qu’y a-t-il derrière les cols empesés, les lourdes robes à panier, les expressions parfois figées des modèles princiers ?


Diego Velazquez, Portrait du pape Innocent X, 1650, 140 x 200, Huile sur toile, Rome, Galleria Doria Pamphilj © Amministrazione Doria Pamphilj srl

« Velázquez fait ce qu’il veut »

, a-t-on souvent entendu dire. Parce qu’il maîtrise absolument la technique picturale, les règles iconographiques – terriblement strictes – de son temps, parce qu’il a une profonde intelligence de la peinture, doublée d’une extrême sensibilité à la réalité – le grain d’une étoffe, la transparence d’un regard, la légèreté d’une mèche de cheveux –, oui, Velázquez a les moyens de faire ce qu’il veut. Et il ne s’en prive pas.



Édouard Manet, le peintre d’Olympia, puis Francis Bacon, ne s’y sont pas trompés. Velázquez est moderne parce qu’il est le « peintre des peintres », c’est-à-dire l’un des plus grands, insurpassable.

La représentation du nu n’est pas autorisée dans l’Espagne très catholique du Siècle d’or ? Il peint l’un des plus beaux nus de l’histoire de la peinture avec La Toilette de Vénus, fascinant nu féminin vu… de dos. Il doit réaliser le portrait de la toute jeune infante ? Il peint Les Ménines, composition complexe, élaborée avec une rare finesse, et où l’artiste se met lui-même en scène. Portraitiste génial, il représente le bouffon Pablo de Valladolid sur un fond neutre, presque abstrait, dont la ligne d’horizon a disparue : une formule que Manet reprendra à son compte.



En 1650, il exécute le portrait du pape Innocent X, qui a tant fasciné Bacon. Le réalisme du visage, le rendu époustouflant des étoffes en font effectivement un inoubliable chef-d’œuvre, qui comportait cependant, aux yeux du pontife, un défaut : « troppo vero » (trop vrai) aurait-il prononcé à son propos. Comme nous aujourd’hui, il avait dû être particulièrement troublé par l’extraordinaire présence de ce portrait.





Sylvie Blin

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