Féminin-Masculin : androgynie et mixité des genres chez Gaultier

Féminin-Masculin : androgynie et mixité des genres chez Gaultier

15 May 2015
Dès ses premières collections, Jean Paul Gaultier montre la frontière poreuse qui réside entre masculinité et féminité, comme l’incarne si bien Grace Jones, chanteuse et icône de la mode des eighties à l’allure diaboliquement androgyne. Cette tension entre les genres est en effet un impénétrable entre-deux.

Nicolas Ruel Collection L’Homme moderne Prêt-à-porter Homme automne-hiver 1996-1997 © Nicolas Ruel

Loin de l’unisexe des années 70 qui tendait à annihiler les différences, Jean Paul Gaultier se fait au contraire le roi d’une mixité assumée et explosive : « J’aime inverser les rôles, briser les codes établis qui n’ont plus de sens aujourd’hui. Je ne crois pas que les tissus aient un sexe, pas plus que certains vêtements. »

 

Jean Paul Gaultier se plait à dévoiler la sensibilité de l’homme et à revendiquer la puissance féminine. En 1985, lors de son défilé mémorable Et Dieu créa l’Homme, il lance la jupe pour homme et n’hésite pas à jouer sur l’autodérision. Malgré son succès commercial en demi-teinte, cette pièce a le mérite de briser les tabous et de susciter de nouveaux questionnements sur l’identité sexuelle. Pour le couturier, la réponse est simple : « Un homme ne porte pas sa masculinité dans ses vêtements. Sa masculinité est dans sa tête. »

 

Ses premières heures de gloire, Jean Paul Gaultier les vit au tempo de l’émergence du mouvement gay et de son vent libertaire. Malgré les résistances, ce climat favorable dépoussière peu à peu le déterminisme ambiant en matière de représentation des genres. Le couturier impose alors une vision toute autre. Sa collection Une garde-robe pour deux de l’été 1985 en est le point d’orgue. Quand l’homme porte tout naturellement des décolletés, la femme en dominatrice corsetée devient l’emblème de sa propre libération sexuelle. Rien d’étonnant donc que les années 50 soient la période favorite de Jean Paul Gaultier qui reconnaît : « La féminité était à son comble. J’aime les femmes fortes.»

 

Fidèle à sa vision première, Jean Paul Gaultier lance en 2003 et en collaboration avec le groupe BPI sous licence pour la création de ses parfums, une ligne de maquillage et des soins au nom décomplexé « Tout beau, tout propre ». Il met une fois de plus la coquetterie au service des hommes et se joue des conventions : « Un homme peut avoir envie de se maquiller légèrement les yeux, de se mettre un peu de poudre bronzante pour se donner bonne mine, sans pour autant perdre de sa masculinité. Il doit avoir accès à ce pouvoir de séduction, au même titre que la femme. »

 



Pauline Weber

Découvrez notre sujet vidéo sur la diversité dans l'art de Jean Paul Gaultier...

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