Jean Paul Gaultier ou le goût de l'anticonformisme et de la provocation

Jean Paul Gaultier ou le goût de l'anticonformisme et de la provocation

10 June 2015
Il est interdit d’interdire : telle serait la devise de Jean Paul Gaultier s’il devait la dicter. Trublion de la mode à l’esthétique débridée, le couturier a grandi dans un Paris en mutation, donnant à ses créations vestimentaires une dimension à la fois humaniste et libertaire. Briseuse de tabous, la mode de Jean Paul Gaultier est en effet profondément engagée et dicte en filigrane un message social fort, teinté de tolérance, d’antiracisme et d’anticonformisme.

Direction artistique et photographie : Jean Paul Gaultier et Francis Menuge Campagne publicitaire pour la collection La concierge est dans l’escalier Prêt-à-porter Femme printemps-été 1988 Mannequin : Laurence Treille © Jean Paul Gaultier

Loin de réduire sa mode à une cause unique, Jean Paul Gaultier reconnaît : « La mode doit correspondre aux désirs du moment et refléter l’actualité. C’est être en amont du temps, c’est savoir le devancer. Le couturier est le catalyseur de son époque, son rôle est de traduire les changements et l’évolution de la société. » Interprète et observateur du monde environnant, ce grand admirateur de Saint-Laurent a ainsi forgé son goût pour la provocation sur les bases traditionnelles du tailleur en combinant maîtrise de la coupe et imagination sans limite. « Je cherche toujours à équilibrer l’excentrique et le classique » résume t-il.

 

Vu à certains égards comme le Vivienne Westwood français, Jean Paul Gaultier est très tôt subjugué par l’atmosphère punk de Londres où il voyage régulièrement. Fasciné par les idées nouvelles qui s’en dégagent, il s’imprègne de son style et en réinterprète les codes à coup d’épingles à nourrice, de clous, de tatouages et de coiffures hirsutes. Plurielles, ses sources d’inspiration viennent également de son environnement premier et oscillent entre les puces, Pigalle, Tati et le Marché Saint Pierre. « Je m'aperçois que je ne fais que brasser toute la culture que j'ai ingurgitée depuis l'enfance » avoue-t-il.

 

Dès ses débuts, il ose les matériaux de récupération, coupe sans vergogne une robe dans un sac poubelle et voit dans une boite de conserve l’incarnation d’un bracelet manchette aux accents tribals(1). Se faisant le miroir de ses convictions, ses défilés rendent hommage au Barbès qu’il affectionne(2) et réconcilient avec humour la bourgeoise(3) et la concierge(4). Jean Paul Gaultier signe alors une élégance nouvelle au service du peuple et à l’image d’une Parisienne sans le sou aux multiples visages. Ce n’est pas un hasard si le siège social de la Maison a pris ses quartiers en 2004 dans l’ancien Palais des arts de l’Avenir du prolétariat, rue Saint-Martin, loin des carrefours chics et balisés entourant l’avenue Montaigne…

 



Pauline Weber

(1)« High tech », Collection femme Automne-Hiver 1980-1981 
(2)Barbès, Collection femme Automne-Hiver 1984-1985
(3)Le charme coincé de la bourgeoisie, Collection femme Automne-Hiver 1985-1986
(4)« La concierge est dans l’escalier », Collection femme Printemps-Eté 1988

Read also

She lived 34 years at the Grand Palais

Vidéo - 9 September 2016
Is it possible to live more than 30 years in the Grand Palais ? It seems crazy, doesn't it ! Though it has been Betty Santacreu’s daily life from 1976 to 2010. Today, the former Grand Palais caretaker is retired but she keeps emotional memories of the years spent in this extraordinary « house » she could call HOME.
Browse magazine