Newton by Helmut

29 mai 2012

Par Dimitri Beck, Polkamagazine.com



Helmut Newton est devenu le héros de sa propre vie. Hasard ou intuition, il s’est photographié dès ses débuts et tout au long de sa carrière.



En 1933, dans l’Allemagne hitlérienne, le gamin juif qu’il est, fragile et couvé par ses parents, se rêve en « grand reporter, parcourant le monde, exhibant [sa] carte de presse au nez des cerbères des plus prestigieux palaces ».* Au studio de la photographe de mode Yva, dont il est l’apprenti, Helmut fixe ce rêve sur pellicule. Il se tire le portrait en fringant reporter. Chapeau de feutre façon Borsalino sur la tête, reflex à la main, il n’a alors que 13 ans. Déjà, il a le goût de la mise en scène. Si beaucoup de photographes ont peur de leur propre image et n’aiment pas être pris en photo, Helmut, lui, s’en amuse. Sans complexe ni pudeur, il rentre souvent dans le champ. Que ce soit avec ses amies au bord d’un lac des environs de Berlin ou bien, plus tard, à travers le monde, lors de shootings avec ses modèles nus ou vêtus, Newton pose torse nu, comme s’il s’apprêtait à piquer une tête dans une piscine. Décontracté et bon vivant, il fait autant le pitre devant l’objectif de Don McCullin que devant le sien.



En couverture du quatrième opus de son magazine, « Helmut Newton’s Illustrated », il choisit un autoportrait, allongé sur une grande photo de nu posée au sol. Le titre : « Dr. Phantasme ». Il y a de l’autodérision. Mais aussi de la malice et un regard affûté. « Autoportrait avec June et modèles », à Paris en 1981, est devenu l’une de ses photos emblématiques. Lui, en jean et imperméable, l’œil rivé sur son Rolleiflex, est au cœur de la scène sur laquelle il met son modèle préféré, nu, au premier plan aux côtés de sa femme, June. Ce cliché est une « vraie photo autobiographique », comme il l’a confié à Frank Horvat. « Chaque photo est un exercice. » Avec ses médecins, Newton réalise une série d’images où, lui, le patient, est le sujet principal. Il prend la pose, se plaçant en observateur de lui-même, acteur de sa propre vie. C’est grave docteur ? Non. Après tout, photographier, c’est vivre. Être sur les photos, c’est exister. * « Helmut Newton, Autoportrait », éd. Robert Laffont.

 

Autoportrait avec June et modèles

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