Une leçon d’expressionnisme par Rodin
Il s’éloigne de la statuaire et des sujets mythologiques, allégoriques ou historiques. Très tôt, il se libère du sujet au sens traditionnel du terme pour se concentrer sur les expressions de la chair. « Le corps, dit-il, est un moulage où s’impriment les passions. »
À partir de 1890, le maître est unanimement salué comme celui qui a rendu vie à la sculpture. Sa célébrité ne cesse de s’accroître, tout comme son aura. Les jeunes artistes sont nombreux à passer dans son atelier et poussent à leur limite extrême les leçons qu’ils y ont reçues.
Les Bourgeois de Calais, 1889
En 1885, le maire de Calais Omer Dewavrin propose d’ériger un monument en l’honneur des six calaisiens prêts à faire le sacrifice de leur vie pour libérer la ville de Calais en 1347. Rodin répond à cette commande et réalise Les Bourgeois de Calais. Les personnages n’expriment rien d’autre que l’accablement ou le désespoir de l’être humain face à un destin tragique.
Rodin écrit à Dewavrin : « Leur âme les pousse en avant et leurs pieds refusent de marcher. Ils se traînent péniblement, autant à cause de la faiblesse à laquelle les a réduits la famine, qu’à cause de l’épouvante du supplice… Et certainement, si j’ai réussi à montrer combien le corps, même exténué par les plus cruelles souffrances, tient encore à la vie, combien il a encore d’empire sur l’âme éprise de vaillance, je ne puis [que] me féliciter de n’être pas resté au-dessous du noble thème que j’avais à traiter ».