Jardins de délices
Monet découvre le Midi, dont la végétation luxuriante le fascine. Il y revient l’année suivante pour peindre ces paysages, si différents de ceux de sa chère Normandie ! Il délaisse un temps les reflets de la Seine et les brumes d’Ile-de-France pour le soleil méditerranéen que Renoir lui avait vanté. Comme lui, il se passionne pour cette nature foisonnante et domestiquée des jardins (Palmiers à Bordighera), fouille les ombres des buissons, cisèle la palette dorée des plantes exotiques : le peintre jardinier se régale d’un luxe de couleurs voluptueuses. Plus sage, Renoir se cantonne à des visions intimistes de son jardin de Cagnes-sur-Mer, où il s’est installé (Le Jardin de l’artiste).
On retrouve la même atmosphère paisible dans Porquerolles, le verger au bord de la mer d’Auburtin. Une vision idyllique, vaguement antiquisante avec ses jeunes filles vêtues de longues tuniques claires, occupées à cueillir les fruits mûrs de l’été. Au loin, la montagne se jette dans la mer, comme aux temps d’Homère ou de Virgile. Une certaine idée du bonheur se dessine dans ces jardins, imaginaires ou bien réels comme chez Bonnard. Depuis 1904, le peintre séjourne régulièrement et longuement dans le Midi avec ses amis Signac, Vuillard, Renoir, Maillol ou Matisse. Saint-Tropez, Banyuls, Grasse, Antibes, Le Cannet… autant de prétextes et de motifs à de nombreux tableaux, de taille modeste ou beaucoup plus ambitieux comme Paysage du Midi et deux enfants ou L’Été.
Sous les lourdes frondaisons du premier plan de L’Été, des enfants jouent avec un jeune chiot ou se reposent. L’ombre bleutée invite à la sieste tandis qu’un peu plus loin, deux jeunes femmes dénudées offrent leur chair rose au soleil éclatatnt. Le tout offre une merveilleuse symphonie colorée, une pastorale moderne et joyeuse. L’enfance et la féminité comme une promesse de bonheur.