La couleur, éloge de la douceur

La couleur, éloge de la douceur

14 November 2013
Sommeillant dans une boîte archivée sous le mot clé emphatique « Un moment si doux », les cent soixante clichés réunis par Hervé Chandès, pour la plupart inédits, retracent la carrière de Depardon sous le prisme du plaisir, celui de la couleur pure.

« Lorsque je photographie en noir et blanc, je m’inscris dans la grande tradition européenne de ciels chargés, de noirs denses et profonds ; je vois au contraire la couleur très claire, lumineuse, et joyeuse surtout. C’est le plaisir de la couleur que montre Un moment si doux. »


Raymond Depardon, Buenos Aires, Argentine, 2012. 25 x 25 cm © Raymond Depardon / Magnum Photos







A bien regarder ce manteau rouge (Buenos Aires, Argentine, 2012), protagoniste d’une scène de rue anonyme, flirtant avec la persistance rétinienne, pas de doute, oui, il s’agit bien d’une célébration. Il aura fallu attendre la commande de la DATAR sur la France des années 80 pour que la « révélation » opère : la couleur, « trop importante », s’impose aux yeux de Depardon comme une évidence. Elle qui était pourtant partout, déjà, des saisonniers agricoles chiliens aux ruelles dévastées de Beyrouth, dense, envahissante. Même le gris orageux de Glasgow se faisait électrique.



Dès lors, rien d’étonnant à ce qu’il qualifie la couleur de « métaphore de la curiosité ». Ou qu’il convoque, à son endroit, d’intimes souvenirs: « Aujourd’hui quand je pense à la couleur, je pense à l’enfance, aux sucres d’orge, aux bocaux remplis de bonbons aux nuances douces ou acidulées ». S’il décide de retourner, spécialement pour cette exposition, dans cinq des pays qu’il avait déjà parcouru (Ethiopie, Tchad, Bolivie, Hawaï et Etats-Unis), c’est pour mieux en recueillir les contrastes, avec toujours le même souci de justesse : « En tant que photographe, il m’importe de rendre la couleur telle qu’elle est. Je suis un passeur. Je n’ai pas à densifier ni à éclaircir, à sur ou sous-exposer. » Comme si la couleur était à ses yeux autonome, souveraine. On pense alors aux mots d’un autre coloriste hors pair, Paul Klee : « La couleur me possède. Point n’est besoin de chercher à la saisir. Elle me possède, je le sais. Voilà le sens du moment heureux : la couleur et moi sommes un ».

Read also

Meanwhile, on the building site, the Grand Palais is back in full colour

Article - 15 November 2023
A monument of stone, glass and metal, the Grand Palais blends into the urban landscape. However, on closer inspection, it is in fact bursting with colour, and one of the challenges of the restoration work currently underway is to restore all its chromatic ranges.

A taste of Mexico, the trailer of the exhibition

Vidéo - 29 September 2016
Political revolution, but also cultural arts: between 1900 and 1950, Mexico bubbly. Painters, sculptors and photographers, the time of the artists engage and capture the tradition to build a Mexican modernity. Be the journey to discover or rediscover the masterpieces of Frida Kahlo, Diego Rivera, José Clemente Orozco and their contemporaries.
Browse magazine