Monumenta : science et fiction

5 juin 2014
Les Kabakov livrent leurs fantastiques cités comme autant de « science-fictions » offertes à l’imaginaire de leurs visiteurs.

Ilya et Emilia Kabakov, Etude pour la Chapelle blanche, maquette, Monumenta 2014 © Ilya et Emilia Kabakov / ADAGP, Paris 2014

Dans l’œuvre d’Ilya et Emilia Kabakov, science et fiction se répondent pour envisager des mondes nouveaux. Aux frêles dispositifs de fortune (Comment rencontrer un ange ?) répondent, dans certains pavillons, les maquettes et dessins d’étranges outils scientifiques, les inventions amateurs croisent ainsi la haute technologie.

Le Centre de l’énergie cosmique fait état de l’intérêt que les Kabakov portent aux sciences, para-sciences et aux moyens de communication comme vecteurs d’amélioration du monde et de l’homme. L’un des rôles majeurs de ce centre, fonctionnant comme un observatoire, serait d’établir un contact pérenne avec la noosphère.

D’après la théorie du minéralogiste et chimiste russe Vladimir Vernadsky, une couche constituée de toutes les pensées et consciences de l’humanité formerait autour de la Terre une nouvelle atmosphère, une mémoire de toute l’activité humaine, une gigantesque bibliothèque disponible mais inusitée : une sorte de « sphère de l’esprit » pour reprendre l’étymologie du terme. Certains phénomènes inexpliqués (de la découverte simultanée d’inventions aux mêmes endroits aux mêmes moments à l’apprentissage spontanée d’une langue) pourraient ainsi traduire des rencontres accidentelles entre des individus et la noosphère.

Si elle a tout l’air d’une fantaisie surréaliste, la théorie repose pourtant sur des présupposés bien réels. 



Laboratoires, antennes, réservoirs, amphithéâtre… La concrétude et la précision de ces instruments scientifiques leur confèrent puissance évocatrice à partir de laquelle les Kababov, avec un réel talent de conteurs (Ilya fut un illustrateur reconnu de livres pour enfants), développent d’incroyables récits mythiques.

Et s’ils restent à l’état de projets, les outils qu’ils imaginent, le couple les projette souvent au sein des villes : les montagnes de la cité Manas en renferment quelques exemples et les artistes portaient l’idée d’implanter un centre de l’énergie cosmique dans l’ancien complexe minier allemand de Zollverein à Essen, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco.

Qu’ils les créent de toute pièce ou qu’ils reconvertissent des friches industrielles, les Kabakov livrent leurs fantastiques cités comme autant de « science-fictions » offertes à l’imaginaire de leurs visiteurs.

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