Une expo, un métier : Chef de projet d'exposition

12 mars 2012

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Vincent van Gogh, Chauve-souris, 1855 © Van Gogh Museum, Amsterdam (Vincent van Gogh Foundation)

Pouvez-vous nous présenter votre métier ?

Marion Tenbusch : Je suis chargée de conduire la réalisation de projets d’exposition, de leur genèse à leur production finale dans le respect de leur objectif scientifique, des délais et budgets impartis. Je coordonne l’ensemble des interlocuteurs internes et externes fédérés autour du projet et accompagne le ou les commissaires dans l’évolution du propos, du contenu, en l’adaptant au lieu d’exposition, au public et au budget.

Le chef de projet est en outre l’interlocuteur principal des prêteurs. Il négocie l’obtention des prêts en étroite collaboration avec le commissaire, constitue les dossiers de prêt et étudie avec les prêteurs, qu’il s’agisse de musées publics ou de propriétaires privés, les conditions de présentation de leurs œuvres. Enfin, il organise la mise en espace muséographique du propos de l’exposition, participe au choix du scénographe et à l’élaboration du projet scénographique et suit le déroulement du chantier d’aménagement…

Au fur et à mesure des différentes phases d’une exposition, de nombreux acteurs agrandissent l’équipe formée autour du projet : scénographe, responsables de la sécurité et de l’exploitation du lieu d’exposition, éditeur en charge du catalogue d’exposition, iconographe, membre du service financier, chargé de programmation culturelle, régisseur d’exposition, régisseur d’espace, chargé de communication, attaché de presse, graphiste, éclairagiste, restaurateurs, équipe multimédia, chargé de mécénat, responsable des produits dérivés, responsable des relations publiques…
Tous ces intervenants sont en lien constant avec le chef de projet qui leur fournit les informations relatives au contenu de l’exposition et à l’avancement du projet.

Combien de temps met-on pour réaliser une exposition ?

M. T. : Aucun projet ne ressemble à un autre et il est indispensable d’adapter les délais aux particularités du contenu d’une exposition. En général, la préparation des expositions présentées aux Galeries nationales du Grand Palais commence deux à trois ans avant leur ouverture. Dans la plupart des cas, le commissaire a déjà réfléchi depuis bien plus longtemps au projet. Pour l’exposition « Beauté animale » la commissaire, Emmanuelle Héran, a présenté son projet et sa liste d’œuvres idéale il y a deux ans et demi environ. Nous avons alors procédé à des simulations d’accrochage et n’avons cessé d’affiner la liste pour parvenir à une parfaite adéquation entre le propos, les espaces et les moyens financiers.

Dès qu’une liste d’œuvres est arrêtée les demandes de prêt sont envoyées aux prêteurs. Le contenu de l’exposition est ensuite adapté selon les réponses obtenues. La négociation des prêts est achevée environ deux mois avant l’ouverture de l’exposition.

Quelle est l’originalité de cette exposition selon vous ?

M. T. : Pour « Beauté Animale », elle réside selon moi dans la grande variété des œuvres : des peintures, des sculptures, des arts graphiques, des photographies… qui n’est pas si fréquente dans les expositions et surtout la ponctuation du parcours par des œuvres et installations contemporaines présentées dans des espaces « en rupture », peints en gris et éclairés de manière clinique. Par exemple une section consacrée à la zootechnie avec le Poodle (caniche) de Jeff Koons, ou l’escalier d’honneur dont le palier bas sera investi par l’artiste Gloria Friedmann où l’on pourra voir un cerf naturalisé dans un décor de forêt. Sous l’escalier sera accrochée en lustre la Chauve-souris de César et sur le palier haut nous présenterons Octo, une sculpture en bronze de Johan Creten représentant une créature sous-marine…
Les artistes contemporains portent aujourd’hui un regard différent sur les animaux dits « nuisibles » et remettent en question les phobies existantes concernant certaines espèces comme c’est le cas pour l’araignée réhabilitée par Louise Bourgeois.

 Quelles sont vos attentes sur cette exposition ?

M. T. : J’ai hâte de voir La chauve-souris de Van Gogh, mais aussi l’accrochage de celle de César sous l’escalier d’honneur ou encore dans la dernière salle l’Ours blanc de Pompon en regard avec une œuvre emblématique de Gilles Aillaud représentant un ours polaire dans un zoo. Je suis surtout très impatiente de voir comment les œuvres communiquent les unes avec les autres, comment le parcours prend forme.

Enfin, j’ai beaucoup appris en travaillant sur ce sujet. J’espère qu’il en sera de même pour le public qui découvrira que le lien entre art et science, entre notre connaissance de l’animal et notre fascination pour sa beauté continue d’être étroit.

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