Comme un poisson dans l’eau

8 juin 2012

Par Dimitri Beck, Polkamagazine.com

Helmut Newton ne manquait pas d’obsessions. Et les piscines en faisaient partie. Elles occupaient une place privilégiée dans sa vie. Chez lui, ou plutôt en bas de chez lui, dans un immeuble à Monaco, une immense piscine scintillait de mille flashes. Un spot royal sous le soleil du Midi, dont jouissait le photographe, le temps d’une pause entre deux prises de vues.

Jeune déjà, dans le Berlin des années 30 où il a grandi, le petit Helmut nage un kilomètre avant de filer à l’école. Inscrit à un club de natation par son père qui veut le rendre plus viril, Newton participe à de nombreuses compétitions. Les débuts sont difficiles. « Il a fallu me pousser dans l’eau tandis que je hurlais comme un cochon qu’on égorge, mais j’ai appris à nager », confie-t-il dans son « Autoportrait »*.

Vite, Newton excelle. « Je commençais à avoir un physique de nageur, svelte et épuré, avec des épaules puissantes. J’aimais mon apparence. J’adorais le contact de l’eau. J’y étais dans mon élément. Nager est devenu une passion. » Avec les années, cette passion ne l’a pas lâché. Celle de la photographie, révélée un peu avant, non plus. En bon voyeur qu’il est, la plage apparaît comme un rendez-vous idéal pour observer les femmes.

Plus tard, Newton transforme les piscines en théâtres où se jouent des comédies humaines. Là, sur ces studios d’un jour en plein air, les modèles du photographe incarnent le rôle d’athlétiques bourgeoises, héroïnes de mises en scènes fantasmagoriques et incongrues. Dans un ballet photographique à la lumière naturelle directe et crue, la chorégraphie des corps est organisée avec minutie par le nageur passé maître en la matière. Suspendus au cœur de l’image, les plongeons dans l’eau arrêtent le temps. En quelques clics, Newton inscrit ses visions d’adolescent et son univers celui de ses premières amours, l’époque d’une certaine insouciance devenue source d’inspiration.

* « Helmut Newton, Autoportrait », éd. Robert Laffont.

Calendrier Pentax, 1976, Saint-Tropez © Helmut Newton Estate

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