Paris bohème(s)

12 novembre 2012

Par Armelle Fémelat, historienne de l’art et journaliste pour Beaux Arts Magazine

Paris, « capitale de la Bohème » (Balzac)

"Pas de Bohème en dehors de Paris " (H. Murger)

Où à Paris ? Au Quartier Latin, à Montmartre, à Pigalle, à Montparnasse... Le mythe de la Bohème a laissé son empreinte sur les pavés de Paris. Historiquement, la bohème s’est déplacée du centre vers la périphérie : du Quartier Latin et des quais de Seine vers Montmartre, Pigalle et les Grands Boulevards, puis à Montparnasse. Tous différents, les hauts-lieux parisiens de la bohème affichent néanmoins une même ambiance extravertie et décalée, volontiers provocatrice. Le Paris bohème est bouillonnant, insolent, inventif, excentrique et arrogant.  

  • La bohème est née dans le Quartier Latin, organisé autour du Boul’Mich. La Bernerette de Musset et la Musette de Murger logent rue de la Harpe. En 1847, Murger habite rue Mazarine, dans le même hôtel que Proud’hon. Située à deux pas de la demeure de Courbet, rue Hautefeuille, la Brasserie Andler est une annexe de son atelier et le lieu de rendez-vous animé des réalistes. En plus des peintres et écrivains qui s’y retrouvent entre 1840 et 1860 (Baudelaire, Corot, Daumier et Champfleury), il attire nombre d’étudiants et de représentants de la gauche républicaine (Gambetta, Jules Vallès). Autre lieu bohème incontournable, le Café Momus avec le Journal des débats en rez-de-chaussée et dont les plumes – Chateaubriand, Sainte-Beuve, Taine, Renan – côtoient les artistes bohèmes.

 

  • Loin du tumulte et de l’agitation du centre, Montmartre ressemble alors à un village bucolique où cohabitent le petit peuple et les crapules. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, c’est l’épicentre de la bohème parisienne. L’œuvre d’Alphonse Allais illustre bien son ambiance fumiste si particulière. Au pied de la butte, Pigalle est un quartier dédié aux plaisirs de la chair dès la fin du XVIIIe. Située au début de la rue des Martyrs, la Brasserie des Martyrs se transforme en café-concert en 1873 et devient le Divan Japonais (actuel Divan du Monde) fréquenté tour à tour par Baudelaire, Jules Vallès, Toulouse-Lautrec et Picasso. Vers 1840, quantité de soirées artistiques houleuses sont organisées chez Nadar, rue de Montmartre. Le coin des grands boulevards n’est pas en reste, particulièrement animé : l’opéra, les théâtres et les organes de presse y pullulent. Le Divan, à l’angle de la rue Le Peletier, est un boui-boui fréquenté par la fine fleur de la bohème artistique : Berlioz, Baudelaire, Murger, Théophile Gautier, Nadar, Courbet, etc.

 

  • Mais, progressivement, Montparnasse prend le pas sur Montmartre. Après la Grande Guerre, cette zone excentrée de la rive droite accueille les artistes de l’avant-garde. Au début du XXe, la Closerie des Lilas devient le camp retranché de la poésie des quatre continents. À partir de 1911, le Café de la Rotonde est colonisé par les artistes qui désertent Montmartre après le triomphe du cubisme. Le mythe des « Montparnos » s’invente alors à la terrasse du Raspail-Plage fréquentée par Picasso, Modigliani, Juan Gris, Apollinaire, Max Jacob, Cocteau, des tas d’artistes en rupture de ban ainsi que des émigrés politiques comme Lénine et Trotski. Puis c’est l’époque de la Coupole, basilique de l’art moderne et de l’avant-garde. Fin 1927, on y trouve Derain et Foujita, Léger, Man Ray et Kiki (rédacteurs de Cercle et carré) et tous les représentants de l’intelligentsia européenne.

     

Van Gogh, Coin à Montmartre - Van Gogh Museum Amsterdam

 

 

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